Pourquoi une reconversion ?
Un jour de septembre, alors qu’elle revenait de vacances, Catherine, 41 ans, s’est rendu compte qu’elle en avait ras le bol des tableaux Excel et des comptes rendus de réunion. De la pression que lui mettait son chef. Et des marges qui devaient être toujours plus importantes. « Tout à coup, j’ai réalisé que mon métier n’avait plus de sens, qu’il ne m’épanouirait jamais plus. Le soir même, j’ai entamé des recherches pour ma reconversion…dans le yoga ! » Cette chargée de marketing, que la discipline indienne avait transformée, est aujourd’hui professeure de hatha vinyasa. Et heureuse comme jamais. Comme Catherine, un grand nombre de femmes décident de quitter un poste haut placé, rémunérateur, qui fait rêver sur le papier, pour se reconvertir dans les métiers du bien-être. « Je reçois de nombreux actifs qui ne supportent plus de gérer de l’abstrait, loin du produit et du terrain, remarque Marion de La Forest Divonne, coach et auteure de Réinventer sa vie professionnelle… Quand on vient de la commencer (Eyrolles)(1). Ils ont besoin de retrouver de vraies interactions, des retours immédiats et gratifiants. Ils donnent beaucoup à leur entreprise, sacrifient parfois leur vie personnelle, sans compensation à la hauteur de leur investissement. Voilà pourquoi les métiers de l’artisanat et du bien-être ont le vent en poupe. »
Aujourd’hui, changer de vie professionnelle est en passe de rentrer dans les mœurs : 85 % des Français estiment qu’il est bon de changer au moins une fois de métier(2). Et l’idée séduit. La moitié des salariés de l’Hexagone souhaiteraient changer d’entreprise (50 %), de métier (48 %) ou de secteur d’activité (46 %)(3). Et c’est principalement la quête de sens qui motive les reconversions.« Selon un sondage réalisé sur notre site, trouver une activité en phase avec ses valeurs est la raison numéro un d’un changement de cap professionnel, assure Danielle Deruy, fondatrice du site Nouvelleviepro.fr. Les métiers du bien-être répondent à ce besoin car faire du bien aux autres est valorisant, a du sens. »
Nathalie, 52 ans, naturopathe
« Pendant plus de vingt ans, j’ai été responsable administratif et financier dans une agence d’architecture. Je touchais 4 200 € mais j’étais très stressée, je devais gérer la colère des salariés et des fournisseurs quand ils n’étaient pas payés ! À 50 ans, j’ai décidé de devenir naturopathe. Mon but ? Ne plus travailler derrière un ordi, ni avoir de patron. J’ai ouvert mon cabinet en mars 2018. Mon salaire n’est pas très élevé mais mon métier m’apporte énormément, sur le plan intellectuel et humain. »
Le bien-être : Prendre soin de soi et des autres…
L’avantage du secteur ? Il est en grande forme : selon l’Insee, ce marché connaît une croissance de 7 % par an. « Le bien-être est une préoccupation croissante dans notre société, les Français veulent s’occuper de leur santé, prendre soin d’eux, sans être dépendants de leur médecin, analyse Donatien Bertrand, directeur de l’École européenne de bien-être(4). De nombreuses personnes, surtout des femmes, contactent notre école car elles cherchent un métier utile, épanouissant, qui apporte de la reconnaissance. » Un désir de changement qui se manifeste souvent autour de la quarantaine. « À cet âge, un bilan de vie professionnelle et personnelle est effectué, rappelle Danielle Deruy. Certains ne se voient plus continuer vingt ans à leur poste car ils en ont fait le tour.
Ils veulent s’éclater, réaliser un projet qui leur trotte dans la tête depuis des années et se réaliser davantage. » Les critères de choix d’un métier sont alors remis sur la table : le salaire, les conditions de travail, l’environnement, l’épanouissement… « Certains, qui étaient bons élèves, ne se sont jamais posé ces questions, explique Marion de La Forest Divonne. D’autres réalisent que leur orientation a été influencée par leurs parents, ou leur milieu social. Ils optent alors parfois pour un métier moins rémunérateur mais avec des conditions de travail plus agréables, dans un environnement bienveillant. »
Solange, 46 ans, aromathérapeute spécialisée en soins énergétiques
« Dans mon ancienne vie, j’étais responsable éditoriale. À force de discuter avec des auteurs coachs, des psys, je me suis formée aux soins alternatifs. Je les ai pratiqués sur mes proches puis à des amis d’amis. Le bouche-à-oreille marchait bien et il a fallu choisir entre mes deux activités. Après un licenciement en 2012, je me suis lancée. Aujourd’hui, mes clients viennent pour des problèmes physiques ou émotionnels. Ma vie professionnelle me passionne. Mon seul regret est ne pas m’être reconvertie plus tôt ! »
… et un besoin de liberté
La plupart choisissent un statut d’indépendant, souvent parce qu’ils n’ont plus envie d’avoir un supérieur hiérarchique et qu’ils veulent pouvoir mener leur activité sans rendre de comptes. Un Français sur deux (49 %)(5) est concerné ou intéressé par une activité professionnelle indépendante et huit Français sur dix estiment que travailler de façon indépendante est une bonne chose pour l’épanouissement des personnes concernées. Le choix du secteur du bien-être n’est pas anodin ; il est souvent opéré en réaction à un trop-plein de stress et de pression, alors que neuf Français sur dix éprouvent du stress, et que la première cause de stress est la vie professionnelle(6). « Parce qu’ils ont découvert les bienfaits de la sophrologie, de la relaxation, des massages, ils veulent en faire profiter les autres, indique Donatien Bertrand. Ils sont souvent passionnés par ces disciplines et continuent de se former sur les méthodes alternatives. » « Nombre de mes élèves se tournent vers le yoga car elles sont stressées, remarque Catherine, l’ancienne chargée de marketing. Je leur raconte mon parcours et les encourage à changer de voie : une solution radicale mais que l’on regrette rarement ! »
(1) marionlfd-coaching.com
(2) Sondage Odoxa, mai 2017
(3) Sondage BVA, mai 2018
(4) ecolebienetre.fr
(5) Sondage Ipsos, septembre 2018
(6) Sondage OpinionWay, octobre 2017
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