 La maison Mantin est une demeure bourgeoise du XIXème conservée à l'intérieur à la demande de Louis Mantin. Il souhaitait la laisser ouverte au public afin de témoigner du mode de vie de l'époque. |
C’est une jolie ville au patrimoine historique bien conservé. Dans l’un de ses cafés-concert, Coco Chanel a poussé en son temps la chansonnette et trouvé son surnom de Coco. A Moulins se trouve le musée Anne-de-Beaujeu. Et ce joli musée expose actuellement Marcellin Desboutin, un artiste, ami des grands peintres impressionnistes, flambeur et résolument optimiste même lorsqu’il est passé du faste à la misère totale. Un personnage étonnamment contemporain et charismatique. Quelqu’un que l’on aurait aimé croiser à Montmartre, pour de vrai. Exposition Marcellin Desboutin (1823-1902), A la pointe du portrait, jusqu’au 15 septembre 2019. Un fonds de 103 œuvres, peintures, gravures, estampes et dessins. Sans oublier l’auto-portrait que l’artiste avait lui-même donné en 1896 au terme d’une expo à Moulins. La boucle est bouclée.
Moulins, 48h de bonnes surprises
Moulins vaut un week end, à 2h 30 de train de Paris (direct). Balades à faire au cœur de la ville, dans les ruelles au charme médiéval, à voir, la « mal coiffée », les vestiges du château des Ducs de Bourbon au donjon un peu étroit. Les moulinois connaissent mieux ce château sous ce nom de Mal Coiffée. Ne pas manquer la Cathédrale Notre-Dame-de-l’Annonciation. Aux heures de visite, possibilité d’entrer et de voir les vitraux et le retable de Maître Moulins. Entre autres musées, faire un tour avec les enfants au musée de l’Illustration, pour l’exposition C’est pas du jeu jusqu’au 6 janvier 2019 ; une trentaine d’illustrateurs mettent leur talent au service des petits, le parcours proposé étant une vraie initiation à l’illustration, en partenariat avec Djeco, jeux d’apprentissage. Le musée est aussi une résidence d’artistes, donc l’on peut voir de jeunes illustrateurs en plein travail créatif.
Marcellin Desboutin, enfant du pays
Né en 1823 à Cérigny, à une cinquantaine de kilomètres de Moulins, Marcellin Desboutin est une personnalité connue des environs, pour sa vie un brin rocambolesque mais finalement, peu connaissent son travail. D’où l’idée de lui consacrer une exposition et de valoriser ce patrimoine local. Fils de famille, Marcellin Desboutin fait le Petit Séminaire, voie classique, puis monte à Paris pour « faire son droit ». Il fréquente surtout les ateliers de dessin et se passionne pour la gravure, la peinture. Ami de Manet et de Degas, il sert plus tard de modèle pour le tableau Dans un café (ou l’Absinthe). Pour autant, qui sait que ce personnage un peu renfrogné devant un verre d’alcool, au côté d’une jolie brunette, hé bien c’est lui ? D’ailleurs, il boit un café, pas de l’alcool… Qui sait que la brunette, c’est la comédienne Ellen Andrée, compagne d’un peintre et modèle pour de nombreux impressionnistes ? De ces séances de pose pour Degas elle dira « on avait l’air de deux andouilles, avec Marcellin Desboutin ».
Marcellin Desboutin, marchand d’art et jet setter
Voyageur, le jeune homme s’établit en Angleterre puis en Italie, à Milan où il achète une sublime demeure. Marchand d’art, collectionneur et artiste, il a tous les atouts pour « faire de l’argent ». Son salon devient très vite the place to be. Mais en 1879, il connait un revers de fortune qui lui sera fatal. C’est là où ce jet setter devient particulièrement intéressant, atypique, un vrai artiste, au fond : il sait qu’il aura désormais des fins de mois difficiles, et se demande certainement sur qui il pourra compter. Il brade la villa d’Ombrellino, vend ses biens, ses collections, se remet à la peinture à l’âge de cinquante ans tout en sachant que personne ne l’attend. Mais il a foi en la vie, en l’avenir. Embarque sa famille, direction Paris. A Montmartre, il retrouve un peu de sa jeunesse, l’esprit bohème qui lui avait tant plu et trouve refuge dans un taudis. Très vite, il se refait un carnet d’adresses, ce nanti déchu, ce clochard céleste séduit par sa force de caractère, sa volonté, sa curiosité. Ce n’est pas un opportuniste mais un homme de bonne compagnie et sincèrement épris d’amitié. Ainsi nait sa story telling, celle d’un artiste qui a déjà eu mille vies sans pour autant s’attacher au matériel, malgré les apparences. Qu’il ait de l’argent ou pas, Marcellin Desboutin reste Marcellin Desboutin. Ce qui le rend très attachant.
Marcellin Desboutin, peintre de l’expression nue
Ce qui frappe dans ses portraits d’adultes, d’enfants, dans ses auto-portraits, c’est la dimension « photo ». D’ailleurs, l’un de ses fils deviendra photographe… Pas de complaisance ni de fioritures, c’est l’expression du visage, l’humeur, les traits, qui intéressent l’artiste. Quitte à déplaire. Lui même se représente en fumeur, jamais en peintre avec palette et chevalet. Le portrait de Louise Victorine Ackermann a la particularité d’avoir été une toile volée. Lors d’un appel aux particuliers, le musée a eu la stupeur de retrouver cette toile dans les mains d’une personne de bonne foi qui l’avait achetée à un antiquaire ou un brocanteur. La voilà donc revenue au bercail et dans la série de portraits terminant l’exposition. Une expo passionnante sur un artiste peu connu du grand public et dans une ville qui mérite plus qu’un coup de projecteur.
photos vues de Moulins, Valérie Rodrigue, photos des oeuvres de Marcellin Desboutin, musée Anne-de-Beaujeu.
Carnet d’adresses :
- Musée Anne de Beaujeu, 3 place du Colonel Laussedat, 03000 Moulins.
- Chambres d’hôtes “La demeure de Babette“, hôtel particulier au pied de la cathédrale, avec piscine, jardin et terrasse. 2 adultes, 98€ la nuit, petit déjeuner compris.
- le “Grand Café”, café-restaurant où Coco Chanel a débuté comme chanteuse. 9 place de l’Allier.
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