Voilà… je suis homo ». Votre ami, votre frère, votre fille vient de vous révéler qu’il ou elle aimait les personnes du même sexe ? Si vous ne vous y attendiez pas, votre première réaction est la surprise. Suivi rapidement d’une dose d’inquiétude, surtout s’il s’agit de votre enfant. Pour certains, parce que leur sensibilité culturelle est mise à mal, la nouvelle est rude à encaisser et leur réaction, violente. « Mon mari Stéphane est resté sans voix, se souvient Marie, 48 ans, dont l’aînée, Clara, a fait son annonce l’été dernier. Il n’était pas capable de parler, sous le choc. Une fois en tête à tête, il m’a avoué que pour lui c’était inacceptable que sa petite fille chérie soit une lesbienne, « une camionneuse ». Découvrir que son ado de 16 ans avait une vie sexuelle et, qu’en plus, elle était attirée par les femmes était impossible à encaisser. » La raison ? Dans la société actuelle, la présomption d’hétérossexualité l’emporte encore : dans notre esprit, les personnes que nous côtoyons sont toutes par défaut hétérosexuelles. Certains tombent des nues et ne réagissent pas comme prévu. « Il ne faut pas en avoir honte, affirme Bartholomé Girard, président de l’association SOS Homophobie. Ce sont souvent les craintes ou la méconnaissance des gays et lesbiennes qui nourrissent cette réaction. Le fait est que l’on parle encore trop peu d’homosexualité à l’école, au sein de la famille, dans les médias. » Être homo signifie encore être hors-norme.
Exprimez vos émotions et instaurez un dialogue
Le coming out de votre proche vous chamboule ? Ne niez pas les émotions qui vous traversent. « Il est important de les accepter et de chercher à les décrypter plutôt que faire semblant, en donnant l’illusion d’une pseudo-acceptation », conseille Isabelle Lacheref, psychologue de formation et auteur de Bien réagir au coming out d’un proche (éditions Jouvence). « Soyons honnêtes, aucun père ni aucune mère n’imaginent avec satisfaction que sa fille ou son fils révélera un jour son homosexualité. » C’est, en effet pour les parents que l’annonce peut être particulièrement douloureuse : ils doivent faire le deuil de l’enfant idéalisé qu’ils avaient en tête et pour lequel ils avaient bâti un scénario de vie. Certains ont besoin de temps pour accueillir cette nouvelle, des mois, parfois des années. « Il existe autant de façon de réagir à l’annonce de l’homosexualité d’un proche que de personnalités différentes, affirme Isabelle Lacheref. L’important est de ne pas briser la dynamique de confiance qui s’installe à cet instant entre votre proche et vous. » Pour que cela se passe au mieux, il est nécessaire d’exprimer vos doutes, vos inquiétudes, tout en instaurant un dialogue. Seuls impératifs : ne jugez pas, ne formulez pas de propos blessants et bannissez les paroles définitives, du type « je ne veux jamais rencontrer ton petit ami ». N’oubliez pas que révéler son homosexualité est un acte courageux, nécessaire, une démarche de vérité et d’honnêteté. Car cacher un pan entier de sa vie à ses proches empêche d’être soi-même et d’avoir des liens authentiques. « Le coming out est souvent motivé par l’envie de ne plus vivre dissimulé, d’accéder à plus de sérénité après plusieurs années de vie clandestine, détaille Isabelle Lacheref. Parfois, l’élément déclencheur est une rencontre avec un compagnon ou une compagne et la décision de s’engager à deux dans une vie commune. »
Rassurez-vous et combattez les stéréotypes
« Quand ma fille m’a annoncé son homosexualité, j’ai eu peur pour elle, je craignais qu’elle se fasse malmener à l’école, que l’on se moque d’elle, raconte Marie. Elle m’a répondu, avec justesse, qu’elle n’était pas plus en danger que n’importe quelle adolescente du lycée. » Souvent, comme pour Marie, les parents craignent le regard et l’hostilité des autres. Ils ont également peur du milieu homosexuel, avec l’image stéréotypée qu’en véhiculent les nombreuses idées préconçues qui subsistent encore. « Les représentations sociales et culturelles de l’homosexualité nous renvoient à des images caricaturales d’hommes efféminés ou de lesbiennes à l’allure de camionneurs, note Sylvie de Lannoy, présidente de l’association Contact Paris, qui aide les homosexuels et les bisexuels à communiquer avec leurs parents et leurs proches. Or il ne s’agit que de clichés ! » Autre crainte pour les proches, le sida, encore associé systématiquement à l’homosexualité, surtout masculine. « Une autre peur infondée puisque les hétérosexuels sont autant exposés au virus : tout le monde doit s’en protéger. »
Affirmez votre soutien et dédramatisez
Si le coming out vous bouleverse, n’oubliez pas que cette annonce est toujours source de beaucoup d’appréhension pour la personne qui la réalise. Oser dire la vérité est souvent le fruit d’une longue réflexion, parfois mûrie pendant des années ! « Il faut dédramatiser l’événement et rassurer immédiatement en affirmant que cela ne changera rien à la relation familiale ou amicale », conseille Frédéric Gal, directeur général du Refuge, association qui soutient les jeunes victimes d’homophobie. Sylvie de Lannoy confirme : « Il est important de réconforter très vite, en disant des mots simples comme “je t’aime comme tu es”, “je t’aimerai toujours”, “tu seras toujours mon enfant ou mon meilleur ami” ». Cette maman, qui s’est engagée dans l’association après le coming out de son fils de 16 ans, ajoute : « annoncer son homosexualité est une preuve de confiance énorme. Une fois la surprise passée et l’annonce digérée, les liens en sortent renforcés, la complicité est plus forte. » Car pour celui qui révèle son homosexualité, l’amour et le soutien des proches sont absolument indispensables : « Sans parents ou amis présents au quotidien, comment trouver la force face aux discriminations et aux attaques quotidiennes dont peuvent être victimes, encore aujourd’hui, les gays et les lesbiennes, s’interroge Bartholomé Girard. Faire son coming out, c’est d’une certaine façon, lancer un appel pour être aimé. C’est l’une des marques de confiance et d’estime les plus fortes qu’un gay ou une lesbienne puisse témoigner à un proche. » Certains proches, surtout les parents, se sentent responsables de l’homosexualité de leur enfant. Ils se reprochent de l’avoir élevé trop durement, de l’avoir trop couvé ou au contraire de ne pas s’être assez occupé de lui…
Ne culpabilisez pas
« Un sentiment de culpabilité qui peut s’extérioriser sous forme d’agressivité contre l’enfant qui n’a pas su répondre à notre attente, contre nous-mêmes ou contre notre conjoint, indique Sylvie de Lannoy. Cette situation, difficile à vivre, aboutit souvent à un état dépressif qui peut, à son tour, culpabiliser l’enfant devant la souffrance de ses parents. Or, cette culpabilité des parents est infondée : rien ne permet d’affirmer qu’ils sont responsables de la situation. » Pour ceux qui apprennent la nouvelle, l’image de la personne qui fait son coming out peut se trouver modifiée, voire ébranlée. Or, dans les faits, elle n’a pas changé. Sa personnalité intime reste la même, celle que l’on a toujours connue, avec ses qualités et ses défauts.
Ne changez ni de regard ni de comportement
Certains parents peuvent vouloir changer leurs enfants, les « guérir », or il ne s’agit pas d’une maladie ! « Si nous cherchons à forcer notre enfant à changer, il risque de nous rejeter ou de se rendre malheureux en essayant de nous plaire, met en garde Sylvie de Lannoy. Au contraire, il est indispensable que nous respections sa façon de vivre, que nous cherchions à le comprendre et que nous l’aidions à s’assumer tel qu’il est, en l’entourant de tout notre amour. » Un chemin plus ou moins facile, qui nécessite parfois du temps. « Tous les parents qui ont vécu cette situation pensent sincèrement que seule cette démarche, fondée sur l’écoute, le dialogue et l’absence de jugement, peut être constructive » ajoute la présidente de Contact Paris. « La personne homosexuelle n’a pas choisi d’être ce qu’elle est, mais elle le restera vraisemblablement toute sa vie, rappelle Isabelle Lacheref. Si elle s’assume bien, elle pourra vivre aussi heureuse que n’importe qui. » Adopter le bon comportement, bien entourer, c’est une façon de l’aider à y arriver. Votre rôle à jouer.
Pour en savoir plus
- Association Contact : asso-contact.org, 0805 69 64 64, ligne d’écoute confidentielle et gratuite depuis un poste fixe.
- Association Le Refuge : le-refuge.org, ligne d’écoute 24 heures/24 et 7 jours/7 : 06 31 59 69 50.
- Association SOS Homophobie : sos-homophobie.org, ligne d’écoute 01 48 06 42 41.
- Bien réagir au coming out d’un proche, comprendre et accepter l’homosexualité, Isabelle Lacheref et Paulo Queiroz (éditions Jouvence).
- Moi Homophobe ! Le jour où mon fils m’a révélé son homosexualité, Anna Ghione (éditions Michalon).
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